INTERVIEW : Geraldine Dobey, Directrice Générale, Hôtel Barrière Le Fouquet’s Paris
Depuis plus d’un siècle le Fouquet’s bat au rythme du cœur de la capitale et écrit ses plus belles pages. Epitomé d’un savoir-vivre parisien, désormais habilement mis en valeur, par l’architecte Edouard François, grâce à une façade de style haussmannien, l’Hôtel Barrière Le Fouquet’s Paris complète et contribue à perpétuer depuis 2006 l’esprit de la Maison faisant briller ses couleurs sur l’une des avenues les plus célèbres du monde. Pour nous en parler, sa directrice générale, Geraldine Dobey, irlandaise d’origine, nous livre sa philosophie d’excellence du service et de l’accueil. Forte de ses expériences au sein de groupes hôteliers internationaux en tant que Front Office Manager puis Hotel Manager, à Londres pour Hilton, directrice des opérations et directrice générale, pour Mandarin Oriental ensuite, elle dessine désormais un trait d’union entre le patrimoine centenaire d’une des institutions françaises les plus renommées et la vision du Groupe Barrière seule marque française à rayonner sur le paysage parisien de l’hôtellerie de grand luxe.
Vendom.jobs – Qu’est-ce qui vous a sensibilisée aux métiers de l’hôtellerie et plus particulièrement du management ?
Geraldine DOBEY – Je suis littéralement « tombée » dedans par hasard. Je n’avais pas identifié au départ l’hôtellerie comme une carrière envisageable mais, ayant débuté très jeune dans ce secteur, il m’a vite séduite. Suite à ces premières expériences, j’ai poursuivi un cursus dans ce domaine. J’appréciais particulièrement l’ambiance de travail avec les équipes, l’esprit d’entraide qui y règne, le contact avec le client mais aussi les collaborateurs. Un autre facteur très motivant est le fait d’être toujours en action, de passer d’un service à un autre. Le secteur de l’hôtellerie de luxe s’est alors imposé à moi car je pense que l’on doit toujours aller plus loin, se surpasser. Les valeurs de qualité, d’exigence, de perpétuelle remise en question y sont attachées et j’y tiens beaucoup. De plus, à Paris la concurrence est grande et nous sommes toujours poussés à être les meilleurs pour nos clients qui sont au centre de nos préoccupations.
Lorsque l’on travaille à la direction générale d’un hôtel, nous collaborons avec l’ensemble des services : les équipes commerciales, la communication, etc. Il nous arrive donc de gérer des situations variées qui peuvent être liées à l’offre culinaire avec le Chef des cuisines, à la gestion du bâtiment avec le responsable technique ou encore à l’établissement de la stratégie commerciale avec le directeur des ventes. Aucun jour ne se ressemble ! C’est cela qui m’a poussée à choisir le management car je pense qu’il est l’un des rares métiers où il est possible d’aborder des domaines aussi différents.
V.J.- Quels conseils pourriez-vous donner à de jeunes professionnels nourrissant la même ambition en matière de choix de parcours mais aussi de qualités relationnelles ?
G. D. – L’hôtellerie est un mode de vie, un métier de passion. Lorsque l’on est passionné par quelque chose, il faut le faire jusqu’au bout. Il faut s’investir entièrement. C’est lorsque l’on est jeune qu’il convient d’acquérir le maximum d’expérience car c’est cela qui nous aidera à gérer les équipes, à être force de proposition et à comprendre les différentes problématiques qu’il peut y avoir dans le cadre de la gestion d’un hôtel. Il est également important de voyager, de découvrir des cultures différentes afin de répondre aux mieux aux attentes d’une clientèle multiculturelle. Tout cela nous permet d’obtenir les qualités relationnelles nécessaires à notre communication avec nos hôtes mais aussi avec nos équipes et à prendre des décisions. Je leur conseillerais donc de saisir toutes les opportunités qui se présentent et vivre pleinement ces expériences. Une des principales qualités d’un directeur général est la curiosité. Tous les managers ont forgé leur parcours sur la variété des expériences.
V.J.- Avez-vous connu, à vos débuts, des personnalités marquantes qui vous ont inspirée, que vous pouvez désormais considérer comme vos mentors ? Si oui, lesquelles ?
G. D. – En effet, j’ai eu la chance au début de ma carrière à Londres de rencontrer un directeur général qui a suivi mon parcours pendant près de 10 ans. Il m’a connu comme assistante chef de service et m’a poussé à réaliser tout mon potentiel. Il faisait bien sûr preuve d’une grande exigence envers moi comme envers tous. Il m’a aidée à aller au bout de mes capacités et surtout d’en prendre conscience. Tout en étant intransigeant, il s’est révélé être un vrai fédérateur. Les qualités humaines d’un bon leader priment. Il est nécessaire de travailler dur et bien mais surtout ensemble. Cela rejoint ce qui me plaît dans ce métier, cet esprit d’entraide, comme je le disais. La transmission, la pédagogie font aussi partie de notre métier. Il ne s’agit pas seulement de compétences techniques mais de savoir-être et de valeurs. Le secteur de l’hôtellerie en porte beaucoup car c’est un métier de service avant tout.
V.J.- Diriger une institution comme l’Hôtel Barrière Le Fouquet’s doit certainement laisser des traces sur le plan de son développement personnel et professionnel. Inversement, dans quels domaines souhaitiez-vous apporter votre expertise et votre personnalité au Fouquet’s ?
G. D. – Le Fouquet’s est une institution parisienne depuis 120 ans ! Elle a donc une histoire particulière avec cette ville et sa clientèle est très attachée à la Maison. Toutefois, la gestion de la brasserie Fouquet’s est très différente de la gestion de l’hôtel. J’y apporte, bien entendu, mon expérience internationale et ma culture anglo-saxonne. J’apprends en retour du Fouquet’s car il s’agit d’un groupe familial, ce qui est très enrichissant car nous travaillons en étroite collaboration, notamment avec le président. Cela facilite ainsi la compréhension des enjeux du groupe et me permets de partager mes idées.
V.J.- Quel est votre vision du management ?
G. D. – Je dirais qu’elle est avant tout collaborative. Je me fais fort d’entretenir une communication ouverte avec les chefs de service ; d’établir une approche humaine telle que celle que j’ai vécue pendant mes années de formation. Également, j’encourage à maintenir un haut niveau d’exigence envers soi-même avant tout, tout en gardant un esprit d’entraide. Une bonne ambiance et un bon esprit permettent de conserver cet aspect fédérateur. Mon rôle est de l’entretenir et d’assurer la continuité de cette Maison.
V.J.- Après plus d’un siècle d’existence, qu’est-ce qui continue de rendre selon vous – mais aussi pour votre clientèle – l’Hôtel Barrière Le Fouquet’s l’un des lieux incontournables de la vie parisienne ?
G. D. – C’est son histoire sans aucun doute. Tout d’abord avec le restaurant. L’authenticité que l’on continue à faire vivre par le savoir-faire, le savoir-être que nous transmettons depuis plus d’un siècle et que recherchent nos clients. Nous sommes une Maison, c’est cela qui rend ce lieu hors du commun dans le paysage hôtelier parisien. Notre marque de fabrique est le « luxe à la française ».
V.J.- Quelle est votre vision de l’hôtellerie et de la gastronomie haut de gamme de demain ?
G. D. – Nous parlons beaucoup de l’introduction du numérique mais il se révèle être avant tout un outil qui nous aide à rendre le service plus fluide, notamment en amont de l’arrivée de nos hôtes. Il nous permet ainsi d’être plus performants, notamment au niveau de la transmission des informations, à dégager du temps pour nos clients mais il doit rester invisible à leurs yeux. Les enjeux que traverseront l’hôtellerie de luxe resteront, à mon sens, toujours au niveau de l’humain. La qualité des services, celle de l’accueil, la personnalisation, la sincérité mais aussi la disponibilité par-delà la numérisation, c’est tout le cœur de notre métier. La principale exigence d’une clientèle très haut de gamme est de dépasser cette ère numérique pour en tirer le meilleur mais revenir aux fondamentaux des interactions personnel-client : être là avec le client, lui faire vivre une expérience et partager l’instant avec lui.
Concernant la gastronomie, la restauration de luxe se recentre indubitablement sur la qualité du produit. La clientèle est de plus en plus sensible au respect et la conservation de l’environnement. Les comportements de nos hôtes changent et, en tant que restaurateurs, nous avons le devoir d’être précurseurs sur ce sujet. Au-delà même de cette prise de conscience, ce n’est plus seulement le produit d’exception qui prime mais son origine, sa traçabilité, sa saisonnalité.
V.J.- Avec la récente ouverture de nouvelles fabuleuses suites qui ont fait grand bruit dans la presse en matière de design et d’expérience, pourriez-vous nous livrer quelque développement ou événement à venir à l’Hôtel Barrière Le Fouquet’s ?
G. D. – Nous nous mettons toujours au défi de surprendre nos clients. Nos nouvelles suites montrent à quel point notre Maison est au cœur de Paris. Nous organisons ainsi le Réveillon avec feu d’artifice sur les Champs-Elysées. Quoi de plus parisien et exceptionnel comme expérience ? L’année à venir sera définitivement marquée par la Suite Harcourt qui offre l’expérience du studio mythique et se révèle être notre nouveauté phare. D’autres projets sont en cours notamment du coté du spa où nous avons par exemple signé un nouveau partenariat avec la marque Manucurist qui créé des vernis à ongles éco-responsable ou encore du coté de notre jardin intérieur du Joy où nous travaillons déjà sur le concept printemps-été.
V.J.- Quel est votre luxe personnel ?
G. D. – C’est le temps. J’ai la grande chance d’avoir une vie riche. Mes moments de luxe sont lorsque je trouve du temps à consacrer à ma famille, à mes proches. Les temps est un bien précieux y compris pour nos clients. Être en capacité de proposer à ces derniers de suspendre le temps dans un très bel endroit, entourés d’un personnel agréable et pouvoir créer pour eux un moment chaleureux, est essentiel.